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La méthode Campora

 

 

 

 

 

Réseaux de recrutement

Quand l’ASM savait dénicher

Gestion des transferts

Quand l’ASM savait protéger ses intérêts

 

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La méthode Campora : Quand l’ASM savait dénicher

 

 

 

 

 

Au court de sa présidence, le président Campora avait su tisser un réseau de recrutement extrêmement efficace. De l’Afrique à l’Amérique du sud en passant par la Scandinavie, Monaco disposait d’un large filet d’espions et de rabatteurs qui fut déterminant pour la réussite sportive du club. Petit retour sur un réseau inédit qui nous fait défaut aujourd’hui.

Vers l’autonomie financière

    C’est au début des années 1990 que l’ASM de Jean-Louis Campora commence à tisser sa toile. Généreusement subventionné dit-on par le gouvernement et le palais, le club de la principauté avait pendant plus de dix ans recruté à grand frais des joueurs confirmés. Des internationaux français tels que Sauzée, Touré, Rohr, Poullain ou Battiston mais aussi étrangers venant des clubs prestigieux d’Italie ou d’Angleterre tels que Hateley, Hoddle, Rui Barros, Klinsmann et Scifo. Tous venant compléter un effectif tout droit sortie de l’excellent centre de formation monégasque tel que Bellone, Bijotat, Puel, Amoros, Petit, Thuram ou Grimandi.

Cependant au début des années 90, la donne commence à changer. En France, la grande majorité des clubs de football autrefois association se transforment en société commerciale et la pratique des larges subventions versées par les collectivités, de plus en plus critiquée tend à disparaître. A Monaco, le président Campora est élu à la présidence de l’assemblée monégasque. Une charge politique dont la crédibilité ne peut souffrir d’un club dépensier et en déficit dont il est aussi le responsable.

Ces deux évènements combinés poussent ainsi Jean-Louis Campora à vouloir faire de l’ASM un modèle de gestion autonome financièrement. Un challenge qui sera réussis mais qui nécessitera une politique de recrutement nouvelle. Finis les internationaux confirmés, le club doit désormais rechercher la bonne affaire, qui lui permettra d’effectuer une plus-value à la revente. Monaco doit donc chercher de plus en plus loin des joueurs de plus en plus jeunes. Jean-Louis Campora va être l’artisan d’un habile et riche réseau de recrutement.

Lorsqu’il prend les rênes du club de la principauté en 1976, Jean-Louis Campora va confondre le club en une entreprise « familiale ». Plaçant ses hommes de confiance à des postes administratifs et d’anciennes gloires de l’ASM à la direction sportive. Une méthode en circuit fermée, un instinct grégaire, qu’il va à nouveau appliquer pour son réseau de recrutement 15 ans plus tard.

Car 15 saisons après ses débuts, Campora dispose en effet d’un large carnet d’adresse d’anciens éléments passés au club. Des hommes de nationalités diverses disposés à travers le monde dont certains reconvertis en agent de joueur, entraîneurs ou encore directeur sportif constituant un panel de pièces stratégiques que Campora va activer.

Un organe déterminant pour le club

    Tout en haut de cet échiquier, le président Campora place Henri Biancheri, directeur sportif de l’ASM qui aura la charge de conduire le réseau. Ancien joueur émérite de l’ASM, ancien directeur commercial d’Adidas, Bianchéri est une pièce maîtresse qui concentre seul tout le savoir faire du football professionnel dont la compétence est généralement scindé en deux entre le gestionnaire financier et le manager sportif. Un Bianchéri très actif qui écume lui-même l’Europe du football de la scandinavie (Farnerud, Riise) au Portugal (Da Costa) en passant par les divisions inférieures françaises (Martin, Prso, Sagnol) pour dénicher les bons coups.

Directement salariés du club, Lucien Muller et Delio Onnis forment entre autre la cellule de recrutement de l’ASM auquel viendra s’ajouter N’Doram. Anciens entraîneurs de Monaco, Lucien Muller dispose lui-même de son propre réseau hispanique et parcours toute l’année le football latin pour dénicher en priorité « la perle avec une double nationalité ». Le paraguayen Gamarra, le chilien contreras, le mexicains Marquez où les espagnols Roger et Diego Tristan seront autant de joueurs rabattu par Muller. Une présence en Amérique du sud renforcé par Delio Onnis, présent 8 mois sur douze à Buenos Aires et qui adjoindra Monaco de recruter D’alessandro et Saviola avant leur éclosion et donnera des informations utiles pour voler au bons moments Gallardo ou Ortega aux grands clubs européens.

Autre atout interne, les entraîneurs successifs. Si Campora était peu enclin à laisser à ses entraîneurs gérer directement le recrutement, il était très attentif aux réseaux déjà développés par les nouveaux techniciens du club, ce qui permis d’étendre l’influence monégasque à l’Afrique. Ainsi Wenger est à l’origine de l’implication de l’ASM dans le centre de formation ivoirien de Jean-Marc Guillou qui produira plus tard Yaya Touré. Tigana quant à lui, rapprocha le football malien et l’ASM avec des opérations à Bamako. Sans oublier le centre Aldo Gentile de Dakar qui continue encore aujourd’hui de fournir à Monaco une option prioritaire annuelle sur deux jeunes sénégalais contre 80 000 euros.

Enfin, en marge de ce dispositif rapproché, le club dispose d’une constellation de conseillers, superviseurs, rabatteurs et « d’amis » capables à tout moment d’offrir des services au club de la principauté, tous anciens joueurs du club dont Campora est en excellent terme. Des hommes tels que Jacques Perais disposant de bonnes connections en Afrique et qui sera à l’origine de la venue Weah et Klinsmann. Ou encore Bora Milutinovic, ancien globe-trotter et sélectionneur du Mexique dont le rôle sera déterminant pour la venue de Marquez. Mais aussi Ramon Diaz, alors entraîneur de River Plate qui facilita le transfert de Gallardo à Monaco.

Grâce à cette toile, Monaco sait non seulement où regarder mais aussi comment atteindre la cible : un bon contact pour faciliter les négociations ou une bonne information pour devancer la concurrence

La fin d’une époque

    Certes, la finalité du recrutement de Campora n’était pas toujours positive, le réseau africain fut souvent un échec et le club passa à travers plusieurs perles d’Amérique pourtant identifiée. Mais ce qu’il faut retenir, ce n’est pas seulement les nombreuses réussites de la méthode qui tranche singulièrement avec les échecs répétés d’aujourd’hui, mais la méthode elle-même. Un organe formidable et unique en France qui permettait à n’importe quel moment dans n’importe quel pays d’atteindre un bon élément. De la Copa America à la CAN en passant par les championnats d’Europe juniors. Du Mali au Méxique en passant par la Suède.

Le départ de Campora n’avait pas forcément condamné le réseau de recrutement du club, mais Deschamps qui eut un temps tous les pouvoirs sous la présidence Svara et ne travaillant qu’avec ses propres agents puis Pastor qui voulu marquer son arrivée par une rupture de l’héritage Campora s’engagèrent dans une belle entreprise de destruction.

Aujourd’hui, le réseau de recrutement qui semble très pauvre en qualité, en quantité, et en portée, est clairement l’un des facteurs expliquant les mauvais résultats sportifs du club ces dernières saisons.

 

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La méthode Campora : Quand l’ASM savait protéger ses intérêts

 

 

 

 

 

Depuis plusieurs saisons, Monaco semble systématiquement en position d’infériorité lorsqu’il s’agit de négocier la cession ou l’achat d’un joueur. Pourtant ce sentiment d’impuissance de l’ASM en matière de transfert n’a pas toujours existé. Il fut un temps où, sous l’impulsion du Président Campora, le club savait imposer ses conditions.

    Nombreux sont les exemples ces dernières saisons mettant en évidence que la norme sur le Rocher est de « se faire plumer » lors de chaque opération de mutation. A tel point que les périodes de transferts sont abordées avec beaucoup plus d’appréhension que d’espoirs par les supporters. Que ce soit sous la pression d’un joueur (Nenê) qui profite d’une situation contractuelle avantageuse, sous la pression d’un club puissant ou non (Le Mans avec Coutadeur) qui réussit à imposer ses conditions, ou tout simplement par la malice d’un agent (Perez, Vargas, Welcome ?) qui arrive à abuser de la direction inexpérimenté du club, Monaco semble toujours être le laissé pour compte.

Il n’en a pourtant pas toujours été ainsi. Il y a un peu plus d’une décennie, l’ASM savait très souvent imposer sa loi à toutes les parties concernées, joueurs, clubs et agents..

Savoir poser ses conditions

    Tout club même parmi les plus puissants d’Europe devait respecter à la lettre le « process » imposé par Jean-Louis Campora. Passer par l’entourage du joueur, négocier en sous-marin avec un agent ou engendrer une pression médiatique en dévoilant ses intentions à la presse ne pouvait conduire qu’à un échec cuisant lorsqu’il s’agissait de récupérer un des joyaux du Prince. « Nous avons des structures institutionnelles et hiérarchiques. Un ordonnancement des choses et des valeurs », précisait-il.

Ainsi, lorsque des « amis » approchent directement Tigana pour le faire succéder à Jacquet à la tête de l’équipe de France, Campora coupe court à l’éventualité sans même entamer des discussions avec la Fédération. « Dans ces conditions, aucune chance ! ». Lorsque la Roma dépêche un diplomate au Palais pour offrir 80 MF et un attaquant international (l'argentin Balbo) en échange de Trezeguet, l’ASM se braque et fixe un tarif spécial pour les italiens. 200 MF sont demandés alors que l’affaire aurait pu être conclue dans les règles aux alentours 130 MF. Même son de cloche pour Henry lorsque ses agents décident de dévoiler publiquement les intentions d’Arsenal à son encontre, avant d’en faire part au Docteur.

Traiter en direct avec les bonnes personnes

    Les manigances des agents, justement, n'étaient pas non plus les bienvenues en Principauté. Ces derniers sont même carrément exclus des négociations quand bien même le joueur concerné fait partie de son portefeuille de clients. Campora aime traiter en direct et s’économise au passage la commission de l’agent : « Si quelqu’un ne me sert à rien dans une tractation, s’il n’est pas là, il ne peut prétendre à rien. Les contrats entre joueurs et managers ne me concernent pas. ». Ce fut par exemple le cas avec Porato, dont le transfert vers Marseille a été négocié directement entre bonnes et vieilles compagnie (Campora et Courbis), sans en informer l’agent du gardien de but.

   Seul quelques rares élus, tel que Luciano d’Onofrio (Henry, Spehar) ont droit de cité à Monaco. Avec Campora, les petits arrangements ne se font qu’entres amis, pour s’assurer que les « gestes commerciaux » soient assurément remboursés le moment venu.

Rapidité et discrétion des négociations

    Ces échanges de bons procédés sont aussi pratiqués avec les clubs. Peu adepte des négociations traînant en longueur et susceptibles de capoter lorsque la presse s’en fait l’écho et qu’un club surenchérisse, Campora avait pour habitude d’expédier une offre ferme. Mais elle était d’emblée appréciable pour l’achat de joueurs, apte à faire plier tout dirigeant sans crier gare et lui offrir le sentiment d’avoir fait une bonne affaire. Comme l’avouera Aulas lui-même bien des années plus tard, Campora ne se contentait pas d’acheter un joueur. Il s’octroyait aussi certaines exclusivités sur d’opportunités futures, en même temps que la complaisance des dirigeants de clubs envers le statut particulier de l’ASM, qui suscitait bien des jalousies. Ludovic Giuly, jeune espoir remplaçant à Lyon et non-qualifiable pour les Coupes d’Europe a été acheté à la mi-saison 1998 pour la somme record de 42 MF. Le club n’avait pourtant pas de besoin urgent et faisait de la C1 son objectif prioritaire.

Avoir toujours un coup d’avance

    Ce recrutement était aussi le moyen pour Campora d’avoir un coup d’avance dans l’optique de remplacer le départ prévu de Benarbia. L’anticipation est le maître mot de la méthode du Président. Tout est mis en œuvre à l’avance pour être en position de force lors de futures négociations. Comme lorsque l’ASM échange un bon de sortie à Trezeguet contre une prolongation de contrat de cinq ans afin de pouvoir le céder au prix fort moins d’un an après. Si Campora préparait son coup, il décidait alors quand et à qui vendre pour réaliser les meilleurs opérations possibles rapidement, et dans la plus grande discrétion. Le tout pouvait se faire au delà même de l’avis des joueurs. Lamouchi n’avait pas prévu de partir et son transfert a été négocié sans son accord initial. Campora avait déjà tout réglé pour le remplacer par Luccin. Ou même des entraineurs, Wenger et Tigana ayant appris les ventes de Weah et Petit par voie de presse.

    Eliminer les intermédiaires, accélérer les négociations, anticiper les opérations et opérer en toute discrétion, telle était constituée la recette du succès du Monaco d’alors. L’ironie du sort est que la chute de l’ASM et de son Président au début du troisième millénaire trouve en partie son origine dans la méthode très unilatérale de Campora. Il a cumulé seul en matière de transferts trop de mauvaises décisions en trop peu de temps, entre 2001 et 2002.