Après
une première apparition lors de la saison 1976, Jean-Luc Ettori obtient la confiance surprise de Lucien Leduc
pour débuter la saison 1978, année de la remontée en D1, en temps que
titulaire. Il ne quittera plus jamais le poste durant 17 saisons.
Rien ne
prédisposait Ettori à devenir à la fois un très
grand gardien et une légende du football monégasque. Natif de Corse, il
passa toute sa jeunesse à Rennes où il fut un fervent supporter de l’équipe
locale. A l’adolescence, il intègre l’INF Vichy et se retrouve sous la
direction d’un certain Gérard Banide, qu’il
côtoiera un peu plus tard à l’ASM.
Au
sortir de Vichy, seul Monaco s’intéresse à lui. Il faut dire que sa stature
ne convient pas forcément à un bon gardien. Du haut de son mètre 74, on le
trouve décidément trop petit pour tenir le rôle de portier. Pourtant, Ettori dispose d’innombrables autres qualités, en
particulier une vivacité et un sens de l’anticipation qui en font, tel un
gardien de handball, un élément impérial sur sa ligne, prédisposé aux
arrêts réflexes.
En 17
saisons de division 1, Jean-Luc Ettori va tout
connaître à Monaco : souffrances et déceptions, mais aussi gloire et
succès. La gloire d’abord avec 3 titres de Champion de France et 3 Coupes
de France, un palmarès d’exception pour un joueur d’exception. Mais aussi
la souffrance, essentiellement en Coupe d’Europe où il connut d’abord la
sombre époque européenne de Monaco lorsque n’importe quel club d’Europe de
l’est croisant l’ASM réexpédiait les princes sur leur rocher. Ensuite et
surtout lorsque Monaco ne sut aller au bout de cette Coupe d’Europe des
vainqueurs de Coupe 1992. Un rendez-vous manqué dans un stade à demi plein
sur lequel pesait le drame de Furiani survenu la veille. Ettori y voyait là la consécration de sa carrière et
une bonne occasion de tirer enfin sa révérence. Monaco disputa là un non
match face à un adversaire inférieur, clôturant la plus triste des grandes
saisons.
Autre
triste expérience, celle de l’équipe de France. Appelé de dernière minute
pour la Coupe
du Monde 1982, Ettori gagne en quelques jours sa
place de titulaire et participe à la belle épopée des bleus de Platini au
mondial. Mais il aura le malheur de passer quelque peu au travers de la
demi-finale perdu face à l’Allemagne et sera considéré comme le principal
responsable. Il sera longtemps le pestiféré du football français, sifflé
dans tous les stades de l’Hexagone.
Il voit
ainsi en Monaco, le club et sa nation, un refuge et un cocon idéal. Il
avouera ouvertement se sentir plus monégasque que français mais se défendra
d’être resté toute sa carrière à Monaco par facilité ou par peur mais juste
parce que « Monaco est ce qui se fait de quasiment mieux en
France » et qu’aucune opportunité à l’étranger ne s’est
manifesté, challenge qui l’aurait intéressé au plus haut point.
Et
pourtant, il dut se battre pour conserver son poste. Au cours des années
90, il ne se passait pas une intersaison sans que l’on annonce tous les
portiers de France sur le Rocher, en remplacement du « vieillissant »
Ettori. Mais à chaque saison, il n’a cessé de
placer la barre un peu plus haut, comme s’il progressait encore et encore,
à plus de 30 !
Pestiféré hier, il finit ainsi par forcer le respect de ses pairs et
du public, même hors de la Principauté. Par ses performances et sa longévité
bien sûr, mais aussi par sa personnalité très attachante. L’homme est
clairement à la hauteur du joueur, simple et discret dans la vie, fair-play
sur le terrain, sympa et toujours disponible pour les supporters : Jean-luc Ettori est
exemplaire.
En tout et pour tout, Ettori n’aura manqué qu’une quarantaine de matchs en 17
saisons dont 13 européennes (!!), principalement lors de la saison
1985, victime d’un staphylocoque qui l’éloigna 6 mois des terrains. Un
exploit qui fait de lui, avec 754 matchs officiels dont 602 en D1 et 60 en
Coupe d’Europe, le recordman de la longévité, le recordman du nombre de
match en D1, et l’ex-recordman français en Coupe d’Europe. Un véritable
monument du football français tout de rouge et de blanc vêtu.
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